Quand on évoque les conséquences du changement climatique, on ne pense pas spontanément aux routes. Et pourtant, la multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes accélère leur dégradation et fragilise leur sécurisation. Aucun territoire en France ne sera épargné par ce changement de paradigme faisant de l’adaptation des routes au changement climatique une nouvelle priorité d’actions des gestionnaires de réseaux.
Les effets du changement climatique sur les routes sont déjà visibles à travers le pays en témoigne l’actualité récente dans le Pas-de-Calais qui fait actuellement face à un besoin d’investissement inédit pour remettre en état son réseau de 6200Km de routes départementales, dont 15% ont été touchées par les inondations hivernales. En Ille-et-Vilaine, la tempête Ciaran avait, quant à elle, endommagé 220 tronçons de route[1]. Dans le département de la Manche, le budget route a également augmenté du fait de l’augmentation des précipitations.
Cette envolée des dépenses a fait l’objet d’une première analyse. Dans l’étude commanditée par la FNTP en 2021, Carbone 4 a évalué le coût des investissements curatifs et préventifs à 22 milliards d’€ d’ici 2050 dans les seules infrastructures routières. Ces montants d’investissement peuvent paraître conséquents mais ils sont largement inférieurs au coût de l’inaction dans les décennies à venir.
Au-delà de l’impact direct de l’aléa climatique sur infrastructures routières, La multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes tels que des tempêtes violentes, les inondations, les vagues de chaleur prolongées, les phénomènes de gel – degel en zone de montagne ou le retrait-gonflement d’argile exercent, par ailleurs, une pression croissante sur les sols et donc sur les infrastructures. Ces mouvements engendrent par exemple une multiplication des glissements de terrain détruisant des routes comme ce fut récemment le cas à Nice, en Dordogne, dans le Cantal, le Calvados et bien sûr dans la vallée de la Maurienne rappelant, par la même occasion, la nécessité de sécuriser les circulations ferroviaires transfrontalières à travers la liaison Lyon-Turin au-delà des enjeux écologiques et économiques de l’infrastructure.
Face à ces vulnérabilités croissantes, des solutions existent.
Tout d’abord, la prévention constitue un pilier essentiel des stratégies d’adaptation. Cela nécessite de prendre en compte les projections climatiques dans la planification et la construction des projets d’infrastructures routières. Si InfraClimat permet d’avoir une première approche sur la nature des aléas et des impacts potentiels, une étude de vulnérabilité approfondie s’impose pour identifier les tronçons de routes les plus exposés aux risques climatiques et orienter les investissements de manière ciblée.
Parallèlement, l’adaptation des infrastructures existantes est une priorité. Cela comprend la mise en place de mesures de protection telles que des systèmes de drainage améliorés pour réduire le risque d’inondations, des travaux de surélévation de certains équipements, ainsi que de renforcement pour stabiliser les talus. De plus, des technologies innovantes telles que les revêtements routiers perméables sont expérimentés pour favoriser l’écoulement des eaux pluviales et réduire les risques d’accumulation d’eau sur les chaussées.
S’agissant du retrait-gonflement d’argile, on pourra citer une initiative du Cerema, en partenariat avec les départements de la région Centre-Val de Loire, qui développe de nouvelles solutions de remédiation pour limiter les vulnérabilités des routes affectées par le phénomène de RGA dans le contexte du changement climatique.
Afin de faire face au risque de vagues de chaleur extrêmes, plusieurs solutions existent également pour limiter l’effet albédo (réflexion de l’énergie solaire) ou l’effet de ressuage. Ainsi, plusieurs départements expérimentent actuellement le « lait de chaux », un mélange d’eau et de lait de chaux appliqué directement sur la route pour annuler l’effet « colle » de la chaussée. Concrètement, la solution blanchit la route et évite ainsi sa montée en température.
Enfin, il est important d’insister sur les solutions basées sur la nature (création de barrières naturelles, installation d’îlots de fraîcheur…) qui permettent de limiter l’effet de chaleur et donc l’impact sur l’infrastructure. Plusieurs projets sont lauréats de l’appel à projet du CIRR (Comité Innovation Routes et Rues) et font l’objet d’expérimentations avec des collectivités locales pour réduire le phénomène d’îlot de chaleur, tels que les revêtements clairs perméables à base de liant organo-minéral.